Jean Baptiste Colbert |
Je poursuis ici une réflexion que j'avais initié sur les conséquences d'un déclin rapide du pétrole sur notre économie dans un précédent billet. J'y évoquais la possibilité pour la France de pouvoir encaisser le choc énergétique rapidement, à condition d'imposer une utilisation excessivement stricte de nos réserves stratégiques le moment venu.
Du reste, il est évident que la meilleure façon d'éviter une telle catastrophe sociale et économique, c'est bien de l'anticiper en réformant totalement notre modèle, mais aussi notre endoctrinement culturel au consumérisme, à la croissance illimitée et même à notre gestion de la démographie.
Je renvoie à nouveau vers mon autre blog pour évoquer toutes ces questions avec des chiffres et des données afin d'expliquer ce qui pourrait faire la transformation de notre société. Ce que je souhaite dénoncer ici, c'est un argument constamment évoqué par certains écologistes ou économistes, sur la nécessité de globaliser un régime de décroissance au niveau mondial, qui ne saurait se satisfaire de solutions nationales.
Je m'insurge en effet contre cet argument pour de multiples raisons :
1) Il appartient à chaque Nation de décider de son sort et préserver sa souveraineté alimentaire.
Il est tout à fait admissible de considérer que si par exemple la France, choisissait de réformer intégralement son système économique et agricole afin de garantir que l'ensemble de notre peuple ne pourrait jamais connaître de pénurie alimentaire, quand bien même nous ne disposerions plus d'énergies fossiles suffisantes pour permettre une production et une distribution "normalisée", que cela marcherait même si le reste du Monde devait continuer sur une logique suicidaire.
Par essence, la planification économique voit loin et anticipe le maximum de contraintes, y compris extérieures pour permettre à un peuple de jouir d'une alimentation saine et variée, d'un droit au logement et d'un confort de vie minimum pour atteindre la plénitude sociale. Ce qui signifie donc que nous ne risquerions pas de mourir de faim par ce que nous serions les seuls dans un monde "croissantiste" à organiser notre économie autrement. Le risque serait plutôt de nature militaire dans le sens où certains pays pourraient nourrir une volonté de piller les ressources durement économisées par le peuple Français au sein de son propre territoire, là où les premiers auraient continué de jouer les cigales jusqu'à se retrouver face au mur de la pénurie. Donc un aspect important de la question (et quasiment tabou) n'est pas l'impossibilité pour un pays comme le notre de préparer son indépendance alimentaire et sa frugalité énergétique, mais d'accepter que d'autres ne nous suivrons pas dans cette voie, et pourront être tentés plus tard de nous agresser militairement pour survivre. De ce fait, il serait nécessaire dans le cadre d'une telle planification économique, de doter notre défense de tous les moyens nécessaires pour faire échec à de futures velléités des pays cigales, ou du moins à les décourager très fortement.
2) Réfléchir de façon globalisée, c'est s'empêcher d'agir déjà à sa propre échelle.
Si c'est une évidence que face aux enjeux dont nous parlons ici, il convient d'encourager l'ensemble des Nations à définir des stratégies qui s'harmonisent dans le bon sens, plutôt qu'elles n'entretiendraient une certaine concurrence pour l'acquisition des matières premières, il ne faut pas oublier que tout cela n'est que discussions diplomatiques, généralement tenues en échec par des intérêts divergents. Cela ne signifie pas qu'il faut s'empêcher d'initier et entretenir ces discussions, mais que pendant que les diplomates palabrent, il faut agir là où nous avons le pouvoir de le faire. Et s'il est évident que la France ne peut en rien imposer aux U.S.A d'abandonner ses vues impérialistes sur les ressources du Monde, elle peut à minima raisonner clairement les siennes, et de fait réduire la pression mondiale sur nombre de matières premières puisque nous agirions en ce sens en tant que cinquième puissance économique mondiale. Certes, ce sont bien nos intérêts fondamentaux qui nous pousseraient à agir en premier lieu, mais la conséquence immédiate serait la réduction de nos importations de matières premières diverses et variées, ce qui laisserait donc au reste du Monde plus de ressources à se partager.
Si je suis certain que les pays Anglo-Saxons veilleraient à récupérer cette part de "butin" laissée par la France, notre vision universaliste de la paix entre les peuples pourrait cependant permettre de mettre tout notre poids dans la diplomatie internationale pour que ces excédents de matières premières profitent d'abord et avant tout aux pays les plus pauvres. A savoir que nous avons une relation privilégiée avec une bonne partie de l'Afrique et que les liens monétaires qui nous relient avec 17 entités de la zone FRANC, peuvent permettre de faciliter une meilleure répartition des richesses de façon quasi automatique, cela en dépit des difficultés diplomatiques. Donc très clairement, agir en son propre pays rapidement et en se moquant de l'attitude des responsables politiques des autres pays à ce sujet, c'est améliorer la bonne répartition des ressources dans le Monde de toute façon.
3) Nous ne pourrons encourager le reste du Monde à nous suivre, qu'en étant exemplaires nous même !
Il est dans la nature humaine de s'inspirer des exemples réussis plutôt qu'initier d'elle-même des changements profonds dans sa façon de vivre, car cela nécessite une révolution culturelle majeure face à des mécanismes sociétaux profondément installés.
Ainsi notre dissidence politique regarde beaucoup vers l'étranger pour considérer autrement des mécanismes démocratiques, monétaires ou économiques à installer en France. De la même façon, si nous étions les premiers à initier une planification de la décroissance économique ET démographique avec succès (au sens social et environnemental du terme), à n'en pas douter, d'autres Nations voudraient s'inspirer de notre propre politique. Il y'a partout dans le Monde suffisamment de gens informés sur la nécessité de réduire notre pression sur les matières premières, et si la France montrait la voie grâce à notre expérience multiséculaire d'une planification économique centralisatrice, il est évident que d'autres Nations nous suivraient. Certainement en Amérique du Sud pour commencer et dans de multiples contrées de l'Eurasie ou l'écologie politique ou simplement les nécessités vitales sont bien comprises. Cela influerait de fait sur les pays Anglo-Saxons qui sans vouloir verser dans une certaine xénophobie, ont beaucoup de difficultés culturelles à se réformer à ce sujet, avec peut être le chemin montré au Royaume-Uni et aux U.S.A par l'Allemagne, l'Autriche et l'Australie ou l'écologie jouit d'une certaine compréhension populaire dans bien des luttes politiques et associatives.
A ce titre, je pourfends totalement ce discours fou qui est d'espérer que le Monde entier prendra conscience de la nécessité de revoir totalement sa copie sur notre gestion des ressources, mais je considère néanmoins qu'il peut devenir possible pour ce même Monde d'évoluer dans le bon sens, si un pays (et si possible la France) devienne le premier à changer radicalement de modèle économique et démographique avec succès.
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