mercredi 2 mai 2018

Débriefing de la remontée à vélo entre Bordeaux et Paris du Collectif Citoyens Debout


Madame, Monsieur le Député,

En 2016, notre collectif « Citoyens Debout » animé par nous deux (Sylvain Nisole et Sylvain Baron), avait entamé une marche entre Clermont-Ferrand et Paris dans le but d'interroger les personnes croisées sur la route sur leurs opinions politiques. Nous avons ainsi recueilli des dizaines de témoignages de Français de tous horizons dont une grande partie a été publiée sur notre chaîne Youtube et notre site internet citoyensdebout.fr.

Aujourd'hui en date du 3 Mai 2018, nous venons de terminer une initiative similaire entamée le 18 Avril dernier depuis la ville de Bordeaux. Les questions que nous avons posé aux Français tout au long des villes étapes traversées étaient invariablement les mêmes :
  1. Que pensez-vous d'Emmanuel Macron ?
  2. Qu'avez-vous pensé de la décision de ce dernier de bombarder la Syrie le 14 Avril dernier ?
  3. Que pensez-vous de l'Union européenne et l'euro ?
  4. Pensez-vous que nos grands médias publics et privés retranscrivent parfaitement la diversité d'opinions politiques française ?
  5. Seriez-vous favorable à des réformes constitutionnelles rendant possible pour chaque citoyen, de pouvoir légiférer directement indépendamment de notre représentation politique par l'entremise du référendum d'initiative populaire, et un tel système démocratique vous rendrait-il plus impliqué(e) en politique ?
Nous ne pouvons prétendre parler au nom de tous les Français, ni faire valoir un quelconque monolithisme de ces derniers dans les réponses apportées. Toutefois, sur des dizaines de témoignages recueillis que nous allons peu à peu mettre en ligne sur nos supports internet, nous pouvons faire ressortir de grandes tendances, cela sans biais idéologique de notre part. Nous précisons que nous avons toujours pris soin d'éviter toute discussion politique laissant transpirer nos propres idéaux avant chaque entrevue, afin de ne pas influencer les réponses des citoyens interrogés.
  1. Il ressort donc que pour l'écrasante majorité des personnes interrogées, Emmanuel Macron est « un banal agent du Système » qui n'apportera aucune avancée sociale ou démocratique à l'égal de ses prédécesseurs. Si les Français lui reconnaissent un certain talent en terme de communication et une fermeté appréciée dans la défense de ses convictions, il reste à leurs yeux un banal pion de l'oligarchie à la solde des « banquiers » qui a été promu à la fois par des intérêts financiers et des journalistes totalement asservis. La majorité des personnes que nous avons interrogé, lui reconnaît donc à la fois un certain talent politique tout en restant fermement opposée à sa politique libérale et favorable aux intérêts prédateurs dont il n'est qu'un docile valet à leurs yeux. Très peu d'entre elles pensent qu'il soit au centre du pouvoir politique français et que les décisions soient prises à l'Elysée sur l'agenda des réformes qu'il compte mener. En 2016, nous recevions le même type de réponses à propos de François Hollande, quoi que sur sa personnalité, les critiques étaient autrement plus corrosives que celles entendues à propos d'Emmanuel Macron.
  2. A la question du bombardement de la Syrie décidé par Emmanuel Macron, la majorité des réponses reçues pourrait se résumer en ce propos : « nous ne savons pas exactement ce qu'il se passe sur place, et nous avons bien assez de problèmes à résoudre en notre propre pays pour nous permettre de telles actions militaires ainsi que donner des leçons de démocratie à d'autres peuples ». Si nous n'avons pas précisé en amont de notre interrogatoire que cette décision d'Emmanuel Macron viole spécifiquement l'article 2 de la Charte de l'ONU ; l'article 14 du préambule de la Constitution du 27 Octobre 1946 faisant partie intégrante de notre bloc de constitutionnalité ainsi que l'article 5 de la Constitution de la Vème République sur le respect des traités (et donc notamment la Charte de l'ONU et les Conventions de Vienne concernant la prohibition du recours à la menace, l'emploi de la force ou toutes formes d'ingérences dans les affaires intérieures d'un Etat), nous avons noté avec soulagement que la majorité des Français restent malgré leur méconnaissance du droit constitutionnel et international, tout à fait en phase avec les grands principes qui sont les plus à même de garantir la paix entre les nations.

    Nous relevons que si environ la moitié des citoyens interrogés, tient pour vraies les affirmations politiques et médiatiques qui participent à la propagande de guerre contre
    « le régime » syrien, paradoxalement, elle s'estime très mal informée sur la réalité de ce conflit et considère que journalistes et personnalités politiques impliquées dans cette communication belliciste à l'égard de la Syrie, n'hésitent pas à « mentir » régulièrement sur ce dossier. Sur des dizaines de témoignages collectés, seules deux personnes ont fait part de leur soutien à cette campagne militaire contre la Syrie, au nom des « valeurs » (dont nous continuons de nous interroger pour notre part, quant au pacifisme et à la noblesse de ces dernières).

    En synthèse, nous nous étonnons donc que plus de la moitié des citoyens interrogés soient convaincus que Bachar al Assad soit le dernier des tyrans, même si la majorité d'entre eux pensent que l'oligarchie politico-médiatique colporte volontiers des mensonges à propos de la situation en Syrie. Aucune des personnes interrogées ne savait que Bachar al Assad a mis fin à l'état d'urgence qui régnait depuis plus de trois décennies dans son pays lors de sa prise de pouvoir ; qu'il a fait libéré des prisonniers politiques dans le même temps ; libéralisé l'économie de son pays ; fait voter par référendum une Constitution établissant le respect de la diversité d'opinions dans les médias et partis politiques, ni enfin que la Syrie est un pays laïc ayant des liens culturels et historiques très importants avec la France. Aucun n'avait entendu parler non plus du projet de gazoduc irano-syrien qui concurrençait un projet similaire proposé par le Qatar et la Turquie. Aucun n'a soulevé les intérêts israéliens dans la déstabilisation de la Syrie, ni même évoqué les ingérences de la Turquie, du Qatar ou de l'Arabie Saoudite. Nous relevons en clair que l'éducation des français sur les réalités géopolitiques qui sous-tendent les guerres occidentales au Moyen-Orient ou en Afrique sont totalement ignorées, de même que le point de vue de la Syrie ou de la Russie sur ce conflit n'est absolument pas entendu par nos concitoyens.
  3. « On aurait jamais dû la faire » ! Nous savions déjà depuis notre marche de 2016 que l'Union européenne n'avait pas bonne presse pour les Français, et pas seulement dans nos milieux militants. Mais durant notre remontée printanière sur Paris en 2018, nous avons été particulièrement (et agréablement) surpris par la répétition de cette phrase : « on aurait jamais dû la faire ». Le deuil entre les Français et l'U.E ainsi que l'euro est consommé désormais. Certes, beaucoup craignent qu'une sortie de l'U.E et l'euro puisse avoir des conséquences cataclysmiques (nous saluons ici la propagande anxiogène à ce sujet) mais pour autant, près de la moitié des personnes interrogées, nous a fait part qu'elle considère que la création de l'U.E et l'euro est une erreur - sinon une trahison - de la part de ses promoteurs.

    Une bonne moitié des Français ayant accepté de nous répondre, indique qu'elle n'a pas peur de sortir tant de l'U.E que l'euro, et que la France est un pays suffisamment puissant pour s'en sortir seule, comme à l'ère d'avant Maastricht. Aucun témoignage, y compris parmi les les plus angéliques sur la question, n'a fait part d'une quelconque satisfaction sur la construction européenne. Les Français que nous avons rencontré, comme en 2016 entre Clermont-Ferrand et Paris, témoignent de leur ignorance du contenu des traités et du fonctionnement de la monnaie. Leur ressenti est plus intuitif. Ils discernent l'avant et l'après, particulièrement pour celles et ceux ayant plus de 35 ans. Tous considèrent que depuis l'euro, la vie s'est renchérie et que la situation sociale et économique ne cesse de se détériorer. Malheureusement, une bonne moitié pense qu'il est possible d'améliorer l'institution et ignore totalement qu'il faut obtenir l'unanimité de 28 conflits d'intérêts pour changer la moindre virgule de ces traités scélérats comme en dispose l'article 48 du Traité sur l'Union européenne. Aucun citoyen rencontré ne s'estimait éduqué sur la notion de souveraineté nationale et tous les grands principes constitutionnels et de philosophie du droit qui s'y rapportent.
  4. Vous vous en douterez certainement, les Français n'ont pas été tendres dans leurs réponses à propos des médias. « Ils nous mentent » ; « ils racontent que ce qu'ils veulent bien que nous entendions » ; « ils font du battage médiatique sur des affaires mineures ou des faits divers et occultent des questions politiques et sociales importantes » ; « ils ne servent que l'idéologie des journalistes » : telles sont les réponses les plus régulièrement entendues. Les Français sont las de la « pensée unique » et ne sont absolument pas dupes du travail de sape démocratique d'un trop grand nombre de nos journalistes. Si la Charte de Munich établissant le Code de déontologie et d'éthique des journalistes leur est inconnue, ils s'indignent très clairement de la médiocrité intellectuelle qui sied dans les grands médias publics et privés de notre pays. Ils constatent que les débats politiques et intellectuels les plus profonds se font rares et quasiment jamais aux heures de grande écoute. Paradoxalement, ils ne savent pas où rechercher de l'information alternative et restent méfiants vis à vis de l'outil internet qu'ils considèrent comme trop « fourre-tout ». On y trouve autant des informations sérieuses que des « fake news » à leurs yeux. Aucun n'a pu nous citer un site d'information alternatif ou étranger leur permettant d'entendre un son de cloche différent de l'actualité économique ou internationale, mais la demande est pourtant forte à ce sujet. Globalement, « le parisianisme » ; « l'arrogance » et « l'idéologie » de la plupart des journalistes est source de colère. Ils reconnaissent cependant que certains journalistes font encore du bon travail, et lorsque nous leur avons demandé de noter globalement les grands médias entre 1 et 10, c'est une moyenne de 6 qui a été donnée. Ce sont moins les faits qui sont remis en question que les commentaires des journalistes sur les informations délivrées, qui agacent fortement les Français. L'écrasante majorité des personnes interrogées considèrent que nos grands médias ont sponsorisé la campagne électorale d'Emmanuel Macron et n'ont pas cessé d'être élogieux (et donc sans neutralité) à son égard. Ils n'ont d'ailleurs pas apprécié le lynchage médiatique de François Fillon et la quasi censure des « petits » candidats.
  5. Nous avons été surpris par les réponses des Français en matière de progrès démocratique dans notre pays. Si la majorité se disait évidemment favorable à l’avènement de la démocratie en France, beaucoup s'inquiétaient du manque de culture générale de la population ou des rattrapages qui en découleraient pas des groupuscules minoritaires pour faire avancer leurs propres considérations idéologiques. En clair, un lien était fait entre l'éducation, la notion d'intérêt général et le bon fonctionnement d'un régime démocratique. Pratiquement aucun citoyen interrogé ne remettait en question la nécessité d'une représentation politique, et encore moins le fait que la France ait besoin de femmes et hommes ayant à charge de prendre des décisions pour trancher des débats politiques importants. La moitié seulement se disait prête à s'impliquer plus fortement dans le débat politique si le pouvoir de proposer des lois, les voter et révoquer nos dirigeants par référendum était donné au peuple. Les Français semblent connaître globalement le fonctionnement des institutions suisses et les trouvent préférables au modèle de démocratie dite « représentative » actuellement en vigueur dans notre pays. Ce que nous retenons dans ces échanges est donc la lucidité et la sagesse de nos concitoyens à propos de la démocratie. Ils n'en font pas l'alpha et l'oméga de la bonne gestion politique du pays, ils sont conscients que les passions populaires peuvent dans un cadre démocratique générer plus de problèmes que de solutions, et considèrent très clairement que l'amélioration de nos institutions de telle façon à donner plus de pouvoir au peuple, ne pourrait aller de pair qu'avec une élévation substantielle du niveau d'éducation politique de ce dernier.

En conclusion :

Pour notre part, nous ne nous cachons pas de considérer que M. Macron comme ses deux derniers prédécesseurs est un traître à la patrieet qu'il doit être destitué. Nous revendiquons vouloir sortir de l'U.E, l'euro et l'OTAN afin de rétablir notre indépendance nationale. Nous sommes très clairs sur le fait que nos médias publics et privés les plus importants doivent être réformés tant dans leur personnel que leur fonctionnement. Et bien évidemment nous sommes plus que favorables à ce qu'un processus constituant soit mis en route pour établir la démocratie en France.

Citoyens parfaitement éduqués sur des disciplines telles que l'économie, le droit, l'histoire, la géopolitique ou la philosophie, nous avons profité après chacun de nos entretiens pour faire œuvre d'un peu de pédagogie populaire, ce qui a été fortement apprécié par les Français avec qui nous avons échangé.

Si globalement les réponses étaient sensiblement les mêmes qu'en 2016 sur les mêmes grandes questions générales, nous avons toutefois noté que dans le grand ouest de la France, le niveau d'éducation ou de conscience politique était peut-être un peu plus élevé que dans l'extrême centre du pays. Néanmoins, les trois quarts des Français, comme ceux rencontrés en 2016, restent en déficit d'information et largement défaitistes quant au système politico-médiatique de notre pays.

A leurs yeux, les choses ne peuvent pas changer, ou pour le moins, ne pourrons que s'aggraver progressivement. Nous considérons qu'ils vous revient à vous, mandataires politiques et journalistes que nous interpellons, de nous aider à porter la réalité de l'opinion publique jusqu'au sommet de nos institutions, mais aussi de vous engager avec nous à y trouver des réponses qui puissent redonner foi en notre peuple quant à son avenir.

Nous espérons que vous serez sensibles à ce débriefing de notre marche entre Bordeaux et Paris, et que vous souhaiterez entretenir ou raffermir plus encore vos liens avec notre collectif, pour que nous puissions travailler de façon solidaire, fraternelle et sans partisanerie ou quelconque repli idéologique, à faire advenir une véritable révolution démocratique et sociale en France.

Si nous prenons le soin de vous interpeller, c'est que nous considérons que vous êtes des personnes sur qui le peuple peut compter. Nous avons bon espoir que vous tiendrez compte de nos considérations à votre égard.

Bien cordialement,

Sylvain Nisole
Sylvain Baron

Et tous leurs soutiens du Collectif Citoyens Debout.



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