Ils mugissent dans les brumes leurs fébriles angoisses à l'idée que tout change. Entendez-les hoqueter leur appel à cette si confortable inertie. Ils nous moquent, dissertent sur des impossibilités, établissent leurs conjectures sur la fin de l'Histoire, prédisent doctement que rien n'arrivera plus jamais, et que les tyrans ont d'hors et déjà gagné. Et pourtant, ils s'indignent !
A l'autre bout de la cordée, quelque-part au plus près des cimes, nous sommes quelques-uns à ne plus nous en laisser compter. Nous avons appris à ne plus écouter glapir les prophètes de malheur, nous avons un Everest à conquérir et nous n'avons plus beaucoup de temps. Nous voila donc engagés sur la ligne de front, certes en ordre dispersé, mais nous sommes là et tenons nos positions. Nous ne jouissons pas de pouvoir livrer notre sang à la patrie, c'est bien pire encore, nous lui-livrons notre âme dans cette guerre.
Que je vous envie nobles résistants et soldats d'hier : se battre était pour vous d'une simplicité déconcertante. Un couteau, un fusil et quelques grenades, et le contrat était posé. Tous deviendraient des héros, mais certains ne reviendraient pas. L'ennemi n'opposait pas sa violence avec quelques slogans et journalistes conciliants ; en votre temps, pactiser ostensiblement avec les puissances les plus hostiles, était un acte de courage face à votre détermination. On payait le prix du sang, ses propres reniements et trahisons.
Au Soldat inconnu qui nous contemple depuis les cieux ; au Colonel Fabien qui interroge le sens de ses batailles passées en constatant ce que nous avons laissé faire ; à toi Jean Moulin qui a su créer en ton temps "la convergence des luttes" ; ne désespérez pas de nous : nous sommes bien vos héritiers. Nous ne disposons plus que de notre détermination et de nos propres corps pour uniques armes. Pardonnez que nos soldats et policiers rangent les leurs, plutôt que tenir en joue les traîtres. Nous composons avec les contraintes de notre propre ère historique.
Demain encore, chacun d'entre nous répondra présent en entendant le tocsin qui sonne sur les hauts-parleurs de nos écrans. A nouveau encore, notre ligne de front sera sans cohérence, et nous serons comme vous le fûtes, seulement quelques milliers à nous engager dans la bataille. Mais nous le ferons parce que nous sommes certains qu'à l'issue, nous finirons bien par être des millions. La foi en la victoire a gravé tous nos serments en notre cœur, soyez-en certains : nous n'abandonnerons pas.
Bien entendu, l'adversaire est aussi cynique que redoutable. Evidemment ce dernier se rie de nous tant que nous ne supprimons pas chacun de ses généraux. A n'en pas douter, c'est au sein même de nos propres réseaux que l'apathie, la bêtise et le défaitisme tentent d'instiller le doute dans le moral de nos propres troupes. Et pourtant, nous sommes encore là. Les mêmes résistants reviennent à chaque appel, ignorant superbement les prêcheurs d'apocalypse car nous savons...
Nous savons l'avenir heureux. Nous savons que demain, nous cesserons enfin de survivre et de désespérer. Nous savons que nous pourrons enfin regarder droit dans les yeux notre propre destinée, car plus rien ne fixera sur celle-ci, ses contraintes, son arbitraire, sa promesse d'une agonie lente et misérable. Les puissants d'aujourd'hui seront renversés, leurs propagandistes s'étonneront sans doute de respirer encore, mais tous regretteront l'époque où ils pouvaient haïr et conspirer impunément contre la France, en croyant qu'ils nous échapperaient constamment.
Nous avons des geôles à remplir, des félons perfides à condamner, des salauds à livrer aux peuples martyres ayant survécu à leurs bombes, et parce que nous avons de l'honneur, de l'amour et de la reconnaissance pour tout ce que vous nous avez légué, nous ne faillirons pas.
Entendez-les mugir, les candides dissidents de canapé qui pensent nous donner des leçons de résistance. Ecoutez-les ces pleutres qui se donnent bonne conscience en invoquant ici l'élévation spirituelle de la nation à produire, ici quelques artifices de consommation qu'il faudrait étendre au peuple tout entier. Peuple mystifié, jamais écouté et reconnu pour ce qu'il est, et avec lequel il est hors de question d’interagir. Nous, achevant de nous hisser au sommet de notre Everest, nous laissons le vent emporter leurs jérémiades, et déjà nous progressons vers notre objectif.
Le Roy est nu ce soir, et les nuits sont chaudes. Nous installons déjà son échafaud place de la Concorde, susurrons à sa cour de nous suivre ou bien périr avec lui, et dans les rues de Paris, un parfum de Libération exalte nos dernières forces. Le Grand Soir désormais se rapproche, et la France toute entière devra sa Liberté à une poignée de résistants qui n'écoutaient plus que leur cœur avant de donner l'assaut.
Ô nobles âmes françaises qui aujourd'hui encore, participez de la Libération de la France, ne vous retournez pas. Laissez les lâches et les paresseux nous railler encore, nous ne sommes peut-être jamais unis sur les mêmes batailles, mais nous partageons pourtant les mêmes tranchées parisiennes. Il est certain que viendra le moment où nous convergerons tous ensemble pour proclamer enfin l’avènement du nouveau millénaire, qui jusque-là attendait notre nécessaire insurrection, pour instituer la paix universelle et l'ordre social auquel nous aspirions.
Gare à vous, traîtres et inquisiteurs de notre temps ! N'entendez-vous pas sonner le glas terrifiant de votre chute ? Vous aviez cru faire de la France un vaste marché où même l'Homme se vend, un grand hôtel misérable où les meilleures suites vous seraient éternellement réservées, une fange où nous serions condamnés à nous débattre et nous entretuer pour vous survivre. C'était sans compter sur notre colère, et notre regard constamment porté sur vous. Nous n'avons jamais perdu de vue qui nous opprimait. Fuyez tant qu'il est encore temps ! Les plus sages d'entre-nous serons sans nul doute les moins écoutés, et vos cravates supportent si bien le poids de vos propres corps. Craignez-nous, car nous sommes déterminés et chaque jour plus nombreux. Votre Salut n'existera que dans l'exil, soyez certains que nous comptons nous montrer impitoyables pour vous châtier.
Allons Camarades, avançons encore et n'abandons plus un mètre de terrain face à l'Oligarchie. Regardez-la trembler et s'auto-détruire d'elle-même. Plus nous frôlons leurs costumes, plus l'angoisse les étreint. Les voila qui s'affolent et s'entre-déchirent. Bientôt nous restaurerons notre dignité jusqu'au sein même du parlement. Nous purgerons la France des vautours qui dépeçaient son corps encore chaud, nous proclamerons "Les Jours Heureux" à nouveau, et nous raconterons tout cela à nos enfants.
Allons Camarades, ne vous découragez pas ! La Liberté nous attend. Vous savez qu'elle ne se réclame pas, mais qu'elle se prend !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Quelque chose à ajouter ?