vendredi 21 juin 2013

La France me fatigue...

Il y'a cinq années à peine, j'étais remplis d'idéaux et de rêves. Je m'installais avec la femme de ma vie abandonnant pour le coup mon rêve de voyager à pied à travers la Cordillère des Andes. Cependant, elle comme moi caressions à l'époque le projet d'acheter un voilier d'occasion pour faire le tour du Monde, tout en jouissant d'une maison bien à nous. Une maison qui flotte. A défaut d'Amérique du Sud, je m'offrais donc quelque chose de plus beau et plus grand.

Nous nous baladions sur le bassin à flot de Bordeaux, discutions avec les plaisanciers, nous intéressions au monde du nautisme, aux blogs des baroudeurs des mers, aux différents bateaux. Nous avions jeté notre dévolu sur l'Amphora de Wauquiez. Un joli voilier Français de 38 pieds avec une véritable cabine arrière. Sur le marché de l'occasion, il se négociait entre 45.000 et 70.000 €. Une somme raisonnable si l'on considère qu'un appartement se négocie au moins le double de ce prix, et que nous pouvions habiter le navire tout en payant le crédit l'ayant financé. Bref, pas de loyer supplémentaire à régler, rien d'impossible pour de jeunes gens ayant toute la vie devant eux et un boulot chacun de leur côté. On s'imaginait déjà transporter des médicaments ou des fournitures scolaires dans des pays pauvres tout en parcourant le monde.

Notre trésorerie n'était pas brillante mais pas pire que celle de n'importe quels jeunes Français tentant de s'en sortir dans un pays où l'épargne n'est détenue que par les plus âgés ayant bénéficié des 30 glorieuses.

Lorsque vint le moment de chercher un crédit pour financer notre projet, bien vite nous comprîmes que nous pouvions faire une croix dessus. Seuls les bateaux récents ou neufs (soit des navires très onéreux) permettaient d'obtenir un crédit. Nous avions beau expliquer aux différentes banques et organismes financiers spécialisés que nous avions les moyens de nous engager sur plusieurs centaines d'euros par mois en l'absence de loyers à payer et une facture énergétique proche du néant, rien n'y faisait. Quant aux vendeurs de bateaux, tous cherchaient à acheter plus grand et ne souhaitaient donc pas vendre sous location avec option d'achat.

Dépités, mais amoureux, nous décidâmes de nous installer à la campagne, à 15 Km de Bordeaux. A défaut d'un grand rêve, nous aurions au moins le plaisir de quitter les tumultes de la ville. Au bout de deux ans, pour des raisons toujours un peu compliquées à comprendre, notre histoire s'étiola. Surtout de son côté en vérité. Mais ce ne fut pas seulement notre histoire qui était sur son déclin. Notre niveau de vie aussi baissait. D'une part par ce que nos contrats de travail devenaient plus irréguliers, mais surtout par ce que le coût de la vie se renchérissait. Les impôts, les radars mange-pognon, l'électricité qui augmentait et des découverts qui devenaient de plus en plus compliqués à gérer.

C'est à la même époque que l'homme assoiffé de culture que j'ai toujours été, cherchait à comprendre par les livres et les conférences, pourquoi nous étions soumis à un diktat économique qui se focalisait sur l'instant, au lieu de planifier l'accompagnement d'une pénurie de ressources annoncées sur le long terme. Je travaillais alors plus de 50 heures par semaine en tant que chauffeur routier, et la facture pétrole du transport, je pouvais la visualiser mieux que quiconque avec les 40 litres aux cents kilomètres d'un semi-remorque bien chargé que je conduisais.

C'était encore une époque d'insouciance pour moi. Je jouais de la guitare, écrivais et chantais mes chansons, sortais souvent en soirée, entreprenais la rédaction d'un premier essai politique. Mais ma propre éducation intellectuelle sur l'économie commençait à m'immerger dans tous les thèmes que la dissidence connaît bien aujourd'hui. Je découvrais le versant caché d'une Union Européenne dont je me foutais jusque là, à travers un type qui expliquait patiemment à son auditoire quelques points de traité et d'histoire.

Commençant à faire le lien entre cette institution et ce modèle économique qui nous écrase et détruit toutes perspectives durables, cela pour enrichir très peu de gens, je décidais de m'engager auprès du parti politique fondé par ce Monsieur et pris mon bâton de pèlerin. La traque des parrainages pour la présidentielle, le tractage, le collage d'affiches, l'organisation d'une conférence, bref, je devins un bon militant de base. Ce fut une grande désillusion. Des maires qui ne jouaient pas le jeu républicain sauf pour eux-même, une population complètement abrutie qui, dès lors qu'on évoquait le mot "politique" ou "union européenne" s'éclipsait pour retourner à son activité de consommation dans les rues commerçantes, tout cela doublé d'un parti politique dont la démocratie interne était proche du néant et un esprit timorée s'agissant de l'activisme nécessaire pour s'affranchir de la censure médiatique. Tout cela me faisait douter que la libération serait de nature électorale.

Les militants de l'UPR étaient pour beaucoup un peu trop zélés à mon goût dans leur façon de gérer le dialogue avec les sympathisants d'autres mouvances politiques ayant des idées sur la souveraineté relativement similaires aux leurs. Je prenais alors mes distances avec un militantisme partisan que je trouvais finalement ridicule et contre-productif. L'UPR m'y aida d'autant plus facilement du fait que ma façon de concevoir l'activisme n'était que modérément appréciée par le bureau national.

Comprenant que le problème majeur des partisans de chapelles politiques, étaient leur propension à faire de leurs représentants des sortes de gourou, et entretenir ainsi une opposition caricaturale aux sympathisants du parti politique d'en face, je réfléchissais à des moyens autres que politiques pour fédérer tout ce petit monde.

Deux projets se dessinèrent alors dans mon esprit : Le premier était une révolte monétaire en considérant que le FRANC était d'avantage un symbole politique unificateur de notre Souveraineté plus qu'une pure question monétaire. Dans un monde gouverné par de la monnaie de papier ne valant que notre foi en celle-ci, j'imaginais la création de médailles appelées FRANCS comportant une faible quantité de métaux précieux et une valeur numéraire qu'il suffisait de thésauriser pour épargner à moindre frais sur quelque chose de tangible, autant que nous pourrions par le nombre organiser un référendum de fait.

Un second projet était la création d'un journal dont vous voyez le logo dessiné plus haut, que l'on distribuerait gratuitement à Bordeaux aux passants, aux antennes syndicales, dans les universités, etc, pour réinformer la population. Il suffisait de le financer par la publicité pour que cela tienne, et j'avais déjà quelques bonnes raisons d'espérer obtenir le soutien de quelques acteurs économiques locaux du fait d'un projet correctement monté. Ne restait qu'une maquette à produire pour obtenir une vitrine commerciale du journal et le tour était joué. 

Dans les deux cas, il me fallait être aidé par des talents, notamment s'agissant des questions graphiques et du montage d'un site internet. Si pour le journal, je trouvais quelques compagnons pour m'aider sur de nombreux points, les questions graphiques ne trouvaient pas leurs cerveaux. Du moins, nous ne pouvions pas exiger trop d'une seule personne  qui avait du temps à consacrer à ses études en parallèle.

A MAINTES REPRISES, J'AI FAIS APPEL SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX A TOUS LES TALENTS DISPONIBLES DE LA DISSIDENCE.

Mais cette dissidence préférait passer son temps à se chamailler pour savoir qui du gourou Mélenchon ou du gourou Asselineau ou encore du gourou Le Pen était le meilleur pour rassembler l'ensemble. Cette dissidence quand elle ne se chamaille pas, passe son temps à publier les nouvelles trahisons de nos dirigeants corrompus, mais pourtant bien aux manettes. Elle pousse des cris d'orfraie, se scandalise, s'indigne mais REFUSE de s'investir autrement qu'à travers du blabla numérique.

Pendant que je me battais de mon côté pour construire ces projets et que j'en profitais pour présenter une première conférence à Bordeaux, ma situation financière, elle se dégradait complètement. Une énorme facture d'électricité de 2500 € me tombait dessus en même temps que je tentais de rattraper des loyers en retard en cessant d'honorer les échéances d'un crédit ayant permis de racheter les dettes de ma compagne. Moralité, près de 20.000 € de dettes diverses et variées et des créanciers qui tentent par tous les moyens d'extorquer sur mon compte un argent que je tente de réserver au logement et l'alimentaire.

Comme tous les cons de Français dépassés par leur endettement, je commençais donc par voir une assistante sociale pour réclamer qu'un dossier F.S.L énergie et logement me soient accordés pour me soulager d'une partie de mes loyers en retard et de la douloureuse de EDF. Refus de l'institution soit disant "sociale", je me tournais donc vers la Banque de France. Je constituais un dossier de surendettement après un laborieux rassemblement de justificatifs et un comptage précis de mon endettement, mais il y'a deux semaines de cela, j'ai aussi appris que la Banque de France refusait mon dossier.

Le motif ? Le régime auto-entrepreneur dans lequel je suis rentré pour créer le Trésor Monétaire Français. Ce statut juridique est "bâtard" et intrique  votre patrimoine privé avec celui de l'entreprise.

Aujourd'hui, totalement démuni et avec l'EDF qui menace de me couper le courant en plus d'un huissier de la banque au cul, j'apprends à rédiger dans les formes "une assignation en référé" qui me coûtera près de 100 € de tampon d'huissier, pour demander à un juge d'accepter de suspendre le paiement de mes dettes tant que le recours à la Banque de France n'aura pas été examiné. Assignation qu'un avocat rédigerait en trois coups de cuillères à pot, mais pas gratuitement. Je n'y connais rien, c'est laborieux, cela me gonfle et je suis fatigué de me cogner tout légifrance pour rédiger correctement ce document.

J'avais arrêté de travailler pour me mettre à plein temps sur les projets de journal, de conférences et de révolte monétaire, cela dans le seul but de donner à la dissidence quelques outils pour qu'elle cesse de se taper mutuellement sur la gueule, et puisse s'organiser pour résister, tout en informant une population qui s'en contrefout de notre microcosme cybernétique. Car internet ne révolutionnera rien dans un pays d'abrutis scotchés devant TF1 qui n'ont pas l'habitude de chercher ACTIVEMENT de l'information.

Cela fait ainsi près de deux ans que je ne parviens pas à me séparer de mon ex compagne du fait que nos problèmes financiers contraignent toute possibilité de déménagement. Deux années d'un deuil de notre histoire que je ne peux pas réellement faire. Deux années aussi que je lutte vainement pour trouver des compétences et il vrai un peu de fonds pour démarrer des projets émancipateurs.

Vous voulez un chiffre ?

La Révolte Monétaire plus le journal, tout cela coûte moins de 20.000 € à placer pour que les sites internet, chartes graphiques, premiers tirages imprimés et premières pièces battues soient enfin sur les rails.

Mais désormais je n'en peux plus. Est venue dans ma vie la colère, l'envie de résister, d'entreprendre quelque chose de positif, et désormais je suis bien plus que résigné :

Je suis vide.

Je ne joue plus de musique, mes rêves d'ailleurs sont désormais loin, je n'ose même plus m'informer de la dégradation géopolitique et sociale, je ne m'intéresse plus aux femmes, je ne sors plus et n'en ai d'ailleurs plus les moyens. Je suis devenu un zombie et presque chaque nuit désormais, je fais des cauchemars où je me vois mourir. Car c'est effectivement ce qu'il se passe. Je subis un assassinat social et économique d'un système que j'ai souhaité combattre en pariant sur la colère et l'organisation d'une dissidence très impliquée sur les réseaux sociaux.

Je me suis trompé.

Au fond de moi, reste un peu de colère pour serrer les dents. Peut être est ce pour cela que je me livre à cœur ouvert et sans tabou sur ma situation, car je suis au bord de tout arrêter. J'ai mille raisons de croire aux projets que je défends d'autant que beaucoup de gens s'y intéressent et espèrent qu'ils aboutiront. Mais j'ai encore plus de raisons de ne pas croire en la capacité de la dissidence quant à saisir l'importance des outils que je souhaitais mettre en place. Je ne suis rien, j'ai peut être cru que la notoriété n'était pas indispensable pour valider mes longues explications écrites.

Aujourd'hui, je suis prêt à tout abandonner. Même pas pour espérer me reconstruire une vie loin du tumulte d'une dissidence qui ne fait rien d'autre que partager des publications et des vidéos sur internet. Mais pour au moins tenter d'épargner à une femme pour qui j'ai encore de la tendresse de sombrer avec moi. Cela en reprenant un boulot d'esclave de la route pour payer des créanciers dont la France ne me protège même pas.

La France me fatigue et je n'ai plus envie de me battre pour elle. J'essaye d'évacuer mes pensées les plus noires, mais dans un suicide social à petit feu, je ne parviens même pas à m'offrir l'espoir sur des projets profondément positifs auxquels la dissidence croirait, et qui auraient vocation à évincer mes nuits agitées.

Ce billet est donc une bouteille à la mer. Il y'a des gens qui disposent d'un peu de monnaie, d'autre qui en ont moins, et d'autres qui ont des talents précieux à proposer. Nous pouvons faire avec ce que nous avons, mais pour ma part, je ne peux pas tout.

Ma situation financière fait que je ne peux même pas ouvrir un compte pour l'entreprise actuellement et je ne peux qu'offrir la promesse de me battre si la dissidence voulait bien contribuer à forger les outils que je lui propose. Car si je me sens soutenu, la flamme de la colère autant que celle de l'espoir réanimera mon esprit. Si en revanche, ce billet achève sa vie sur un grand vide, veuillez chers dissidents accepter mon retrait de vos troupes. Je ne peux plus rien pour vous et je ne suis plus très sûr que la France méritasse tant d'engagement de ma part.

S.B


6 commentaires:

  1. "Ce qu'on a mangé et bu l'huissier l'a dans l'cul !"

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  2. Ok je veux bien t'aider mais il faudra m'aider en retour. Moi aussi je suis cassé, enragé contre la génération des trentes glorieuses mais il reste de l'énergie en moi pour faire cramer ce pays si il le fallait. Ce pays vaut la peine d'un point de vue métaphysique, sinon il ne vaut effectivement rien. Mort aux français actuel et vive la france

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  3. Julienvenu@yahoo.fr

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  4. Salut Sylvain

    On se connaît pas mais je comprends ta détresse.
    Ce monde-ci nous rend fou en nous isolant, il nous persuade qu'on est seul alors qu'on est les plus nombreux. Il nous ment, nous épuise, nous disperse jusqu'à ce que nous soyons vides, et là, il nous remplit d'ipads, de pizzas, et de films idiots, qui nous rendent plus maléables et soumis encore s'il était possible. Plus rien n'a de sens, chacun est seul sans but. Peut-être que ton projet n'était pas le bon, ou simplement au mauvais moment.
    Exile toi pendant quelques temps à l'étranger, tu verras, ça change tout.

    Bon courage

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  5. Salut Sylvain, j'ai quelques compétences en graphisme et suis prêt à les mettre au service de ton projet.J'aimerais que l'on se contacte en amont, tiens moi au jus sur cette page.

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    1. Bonjour, je reconnaître que je ne puis être opposé à votre aide. Vous pouvez me contacter directement au 09 83 45 33 39 et sur mail : syldartha@gmail.com

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